Charles Eugène Jules Marie Nungesser vit le jour à Paris le mardi 15 mars 1892, à 03h, chez ses parents, il fut déclaré en la Mairie du 10è arrondissement le 17, jour de la Saint Patrick, à 13h.
Acte de naissance de Charles
Ses parents étaient Laurent Eugène Nungesser, né le lundi 20 juillet 1863, à 20h, au 12, passage Doudeauville à Paris 18è, marchand boucher, habitant au 5, rue de la Fraternité (actuelle rue Guynemer, autre As de la Première guerre mondiale), à Saint-Mandé (Val-de-Marne), et Laure Adèle Prignet, née le vendredi 31 mai 1867, à 18h30, au 35, rue de la Viéuandes (ou Viérrandes) à Valenciennes (Nord).
Acte de naissance de Laurent Eugène, son père
Acte de naissance de Laure Adèle, sa mère
Le 5, rue Guynemer (anciennement rue de la Fraternité), à Saint-Mandé
La plaque commémorative sur le mur de la façade du 5, rue Guynemer
Ses parents s’étaient mariés le lundi 17 mars 1890 à 9h à Valenciennes. Ils divorcèrent le samedi 12 août 1899. Laurent Eugène se remaria avec Marie-Léonie Clavel le jeudi 28 juillet 1904 à Paris 1er. Laure Adèle mourut le mardi 6 février 1945 à Paris.
Charles passa son enfance à Saint-Mandé mais également à Valenciennes, où il vécut avec sa mère suite au divorce de ses parents.
Il était un enfant particulièrement casse-cou, n’hésitant pas à faire l’équilibriste sur la rambarde du balcon, au grand dam de sa mère et des passants qui craignaient de le voir tomber.
Très doué en dessin, il fit l’Ecole des Arts et Métiers de Valenciennes et y obtint son diplôme de mécanique.
Ayant trouvé par hasard un courrier d’un oncle d’Amérique (du Sud, le Brésil), et épris d’aventure, il partit le rejoindre à quinze ans. Bien que ses recherches furent infructueuses, il parvint à se faire embaucher dans une hacienda et y apprit mille métiers qui lui forgèrent sa débrouillardise, son agilité et son caractère : boxeur, cow-boy, etc…
Lorsque fut déclenchée la Grande guerre, de retour en France, Charles se retrouva incorporé, en raison notamment de son habileté équestre, au 2ème régiment de hussards au sein duquel il ne tarda pas à se faire remarquer.
En effet, le 3 septembre 1914, moins de quatre mois après sa mobilisation, venant de baisser la barrière d’un passage à niveau alors qu’il était en reconnaissance en plein territoire hostile avec quelques-uns de ses camarades, il parvint à abattre les officiers occupant une automobile Mors et il se mit ensuite au volant de celle-ci afin d’amener à son commandement les documents dont il venait de se saisir : des plans de l’Etat-Major ennemi, rien que ça !
Franchissant les limites du camp allié, sous les tirs de ses compatriotes (hé oui, la Mors portait toujours les fanions allemands sur sa carrosserie), il parvint jusqu’au général Langles de Cary (qui fut commandant à Valenciennes – le Monde est petit) et lui narra son expédition mouvementée.
Historique du 2ème Régiment de Hussard
Pour cet acte de bravoure, le général lui offrit la voiture. Nungesser gagna ainsi son fameux surnom de « hussard de la Mors », qui deviendra « Hussard de la Mort », en raison des défis qu’il lancera à la grande faucheuse lors de sa carrière militaire d’aviateur.
Aviation 14, par Marcel Jullian
Moins de six mois après son exploit, il obtint son Graal : l’aviation. Il fit ses premiers vols dans le bombardement, arme dans laquelle il mena à bien 53 missions.
Ayant effectué son premier vol d’écolage le 26 janvier 1915 à la célèbre base d’Avord, il reçut le 2 mars 1915 son brevet militaire (n° 1803) de pilote, sur avion Henry Farman HF 20.
Affecté à la VB 106 près de Nancy, il remporta sa première victoire aérienne le 31 juillet 1915 contre un Albatros C, avec l’aide de la Défense Contre Avions (DCA) et d’un homme qui le suivit durant une bonne partie de la guerre, son fidèle mécanicien Pochon.
Il se vit enfin confier l’aviation de chasse au sein de l’escadrille C65 formée d’avions Nieuport X, parmi les plus performants du moment.
N’ayant rien perdu de son caractère trublion de son enfance, il s’attira, le 26 novembre, les foudres du capitaine Gonnet-Thomas à la suite de voltiges réalisées au-dessus du terrain d’aviation.
A son atterrissage, le capitaine lui fit part de son mécontement, accompagné d’un « Allez faire vos cabrioles chez les Allemands ! ». Ce que notre grand Charles s’empressa de faire ! Les « boches » furent tellement surpris des voltiges de Nungesser qu’ils ne lui tirèrent même pas dessus ! Gonnet-Thomas le condamna alors à huit jours d’arrêt de rigueur.
Deux jours plus tard, faisant fi de cette punition, Nungesser attaqua deux avions, dont un Albatros C, près de Nomény, qui lui valut la Croix de la Légion d’Honneur.
Son bulletin militaire
Basé en 1916 à la N65, il fut victime d’un très grave accident lors de l’essai d’un avion Pionnier le 29 janvier qui lui valut de nombreuses fractures (palais, jambes, genou déboîté, …) et un coma. Cela fit dire à ses médecins qu’il était perdu.
Mais à leur grand étonnement, notre « Hussard de la Mort » revint à lui deux jours plus tard !
Fin mars, après avoir refusé une nouvelle fois (c’était en quelque sorte un leitmotiv chez lui) un congé de convalescence, il atterrit seul à Bar-le-Duc où son escadrille était basée.
Ayant repris le combat, il détruisit un Drachen (ballon d’observation) le 2 avril, marquant ainsi sa première victoire de 1916.
Le 4 avril, sa cinquième victoire homologuée (contre un bimoteur aux Hauts-Fourneaux) le fit entrer dans le « hall of fame » des aviateurs car il devint un As (il fallait avoir abattu cinq avions ennemis, que ces avions se soient écrasés en territoire allié, afin que les victoires soient homologuées).
Ces victoires lui amenèrent le grade de sous-lieutenant.
Nommé lieutenant le 29 septembre 1917, il prit la place d’As des As, remplaçant Georges Guynemer hélas abattu le 11.
Nungesser en compagnie de Henri Farré, Marcel Vialet et sans doute Louis de Saint Victor de Saint Blancard en 1917
(date exacte, lieu et circonstance de la rencontre inconnus)
Sa carrière militaire prit fin le 14 août 1918 alors qu’il venait d’abattre quatre Drachens.
Il fut cité et décoré à de très nombreuses reprises : citons la Rosette de la Légion d’Honneur le 30 juillet 1918 et la médaille militaire (pour les autres décorations, merci de consulter l’article « Ses victoires et décorations »).
A l’issue du conflit, il fut le troisième As français.
Toujours en bonne forme et doté d'une formidable résistance aux blessures et d'une volonté inaltérable, il participa en 1918 au Meeting nautique des Alliés.
En 1919, suite à l’accident tragique de l’un de ses amis pilotes, Jean Navarre, il fonda une école de pilotage à Orly qui fit faillite rapidement, mais qui lui laissa le temps de donner, le 28 juin 1921, à l’abbé Gavois son baptême de l’air (célèbre possesseur à l’époque d’Antoinette, surnom de sa Panhard Levassor, première automobile de série au Monde !)
Nungesser en tenue d'aviateur et à sa droite, l'abbé Gavois, en manteau noir
Le 8 octobre 1920, il participa au meeting aérien de Buc, dans les Yvelines.
Charles et son avion, orné de son célèbre insigne, peint par Nungesser lui-même
En 1923, il partit à La Havane puis aux Etats-Unis faire plus de cinquante exhibitions aériennes avec ses amis Weiss et Bellot durant lesquelles il parcourut plus de 40.000 kilomètres.
Il se maria le samedi 28 juillet 1923 avec Consuelo Hatmaker, Américaine, en l’église de la Madeleine, à Paris 8è.
Consuelo et Charles, devant un Morane Saulnier à Orly
En 1924, un impresario le convint de tourner dans un film « The Sky Raider », dont le livre de Pierre Mariel « Le vainqueur du ciel » (1926), préfacé par Charles Nungesser lui-même, est la version imprimée. Le film original, muet, a hélas été perdu…
Cinéma magazine n°35 du 27 août 1926
Explication d'une scène du film
Consuelo et Charles divorcèrent le jeudi 9 septembre 1926.
Nungesser mourut au large de Saint-Pierre et Miquelon le lundi 9 mai 1927, lors de la tentative fatale de la première traversée sans escale Paris-New-York (Atlantique), en compagnie de son ami et navigateur François Coli, à bord de l’avion L’Oiseau blanc, avion-marin basé sur un Levasseur PL 8.
Des recherches sont toujours en cours afin de tenter de retrouver cet avion, ou tout du moins son bloc-moteur, un Lorraine-Dietrich, qui serait la seule pièce ayant survécu aux affres maritimes durant 87 ans (en 2014, année de rédaction de cet article).
Nungesser et ses chiens
Nungesser
(Sources : Archives de l'état-civil des mairies de Paris et de Valenciennes ; Journal "Aviation 14" par Marcel Jullian ; Bibliothèque Nationale de France et Gallica ; Cinéma magazine ; Livre "Historique du 2ème Régiment de Hussards")