Journal Le Matin 15/05/1927

Le Matin du 15/05/1927 Numéro 15761
LE VOYAGE ENIGMATIQUE DE L'OISEAU-BLANC

Les recherches continuent à Terre-Neuve.
Non seulement des aviateurs ont été « entendus », mais deux membres du Parlement canadien ont vu
un avion à Terre- Neuve, dans les environs de Harbour Grace, lundi dernier, entre 9 heures et
10 heures du matin. 

Les faits relatés jusqu'à présent prouvent que : 
1° Le bruit du moteur d'un avion a été distinctement perçu lundi matin 9 mai, entre 9 heures et 
10 heures, à Terre-Neuve,n sur un parcours de 160 kilomètres, entre Harbour Grace et Harbour Breton.
Cet avion a donc franchi, d'est en ouest, la presqu'île Avelon. La distance représente à peu près le
parcours de Paris à Etretat.
2° Deux membres du Parlement canadien, résidant à Bearcove (Terre -Neuve) ont vu distinctement l'avion
le même jour, entre les mêmes heures. La machine (?) se dirigeait vers le nord-ouest. Donc Nungesser et
Coli devaient savoir à ce moment-là, voyant le sol comme on les voyait du sol, où ils étaient. 
3° Aucun avion canadien ni américain n'a volé au-dessus de la presqu'île d'Avelon de Terre-Neuve dans la
matinée du lundi 9 mai.
Et, d'ailleurs, le seul appareil qui existe à Terre-Neuve est un vieil hydravion qui a servi un moment
aux pêcheries et qui est actuellement démonté. 
Il est donc difficile de ne pas admettre que Nungesser et Coti ne volaient pas au-dessus de Terre-Neuve
dans la matinée du 9 mai. 

L'avion était-il perdu dans le brouillard ?
La région de la presqu'île d'Avelon, au sud-est de Terre-Neuve, où un avion a été aperçu et où le bruit
du moteur de cet avion an été entendu dans la matinée de .lundi dernier. D'après l'enquête menée,
le vrombissement du moteur a été perçu sur un parcours den 160 Kilomètres, entre Harbour-Grace Et Harbour-Breton,
situé du côté de la baie de Fortune.
Une personnalité qui connaît Terre-Neuve nous disait hier: « Le brouillard à Terre-Neuve est bas, mais très dense.
Dans une barque de pêche, placé à l'arrière,
on ne voit souvent pas l'avant. Ce brouillard est le fruit de la condensation permanente de la vapeur d'eau
résultant de la rencontre d'un courant chaud du Gulf Stream montant du Mexique et d'un courant froid descendant
du Labrador.
Cette condensation se poursuit d'ailleurs de Terre-Neuve à New-York en passant par la Nouvelle-Ecosse, si bien que,
quand il y a brouillard à Terre-Neuve, il y a presque forcément brouillard à New-York. 
Coli, qui ne devait pas ignorer cette particularité atmosphérique, s'est dit que le brouillard régnant à Terre-Neuve
devait se prolonger jusqu'au but, sur près de 2.000 kilomètres, et il a obliqué vers le Saint-Laurent. 
Là, dans le golfe de Saint-Laurent, en dehors de la zone des courants chaud et froid, le brouillard est moins dense. 
Je ne crois donc pas que Nungesser et Coli en passant à Terre-Neuve, se trouvaient dans le brouillard. Ils devaient
voler au-dessus. » 
Qui dit brouillard dit temps calme et bon conducteur de son. C'est pourquoi on a pu percevoir distinctement le bruit
du moteur d'un avion évoluant à plus de mille mètres. Il est donc logique de dire que si Nungesser et Coli n'ont pas
été victimes d'une panne après leur passage au-dessus de la presqu'île d'Avelon, ils ont mis le cap nord-nord-ouest,
vers le temps clair, certains qu'ils étaient de rencontrer la terre, tandis que vers sud-sud-ouest, restant pendant
des centaines de kilomètres dans la zone brumeuse, ils pouvaient dériver sans le savoir et se perdre dans l'Atlantique,
bien au large de NewYork.

 

Source : Gallica

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